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Ludwig van BEETHOVEN
CONCERTO POUR PIANO ET ORCHESTRE n° 4 EN SOL MAJEUR Op. 58
Composition : 1805-1806. Création privée en mars 1807, et publique le 22 décembre 1808, à Vienne, par le compositeur.
Deuxième mouvement : Andante con moto
Beethoven a écrit sept concertos : cinq pour piano, un pour violon, et un Triple Concerto pour piano, violon et violoncelle.
Des cinq concertos pour piano de Beethoven, le Quatrième est le plus original et même le plus déroutant quant à l’architecture de ses mouvements. Il déborde d’astuce et de vie, mais il innove dans la succession des événements, qui n’est pas conventionnelle. C’est particulièrement vrai dans le mouvement lent central.
La réputation d’antagonisme, de « bagarre » entre le piano et l’orchestre, qui s’attache aux concertos de Beethoven, réputation un peu surfaite, trouve cependant son illustration emblématique dans ce deuxième mouvement.
D’un côté, un orchestre arrogant, bourru ; et de l’autre un piano plaintif, qui chante comme une victime aussi gracieuse que sans défense : telles sont les données de départ, et au fil de ce bref morceau le rapport de pouvoir va s’inverser. « Une lutte entre deux personnages de caractère différent », notait Vincent d’Indy. A l’orchestre revient un langage sommaire, confiné dans la couleur volontairement terne des cordes, les registres graves, l’unisson, les silences ; au piano les supplications sont plus élaborées, et fleuries de quelques ornements.
19’25, Début : Les cordes jouent à l’unisson, donc un peu sommairement toutes la même chose ; elles exécutent un motif sombre, haché, tranchant, indiqué sempre staccato.
19’43, Première réponse du piano, très différente, et indiquée molto cantabile. Le pianiste joue en douceur et, contrairement à l’orchestre, il produit des accords : on dit que sa partie est « harmonisée ». Sa phrase finit sur un gracieux ornement.
20’17, 2e intervention de l’orchestre, toujours dans le genre revêche, et montant plus haut vers l’aigu, comme une menace.
20’31, 2e réponse du piano, harmonisée, liée, indiquée pianissimo, molto espressivo.
A la fin, l’orchestre lui coupe la parole.
21’10, Les échanges se font de plus en plus brefs entre les deux protagonistes. Les courtes phrases de l’orchestre descendent, tandis que les motifs du piano montent.
21’43, Un peu interdit, cet orchestre baisse progressivement pavillon, diminuendo, et plus loin : sempre diminuendo.
22’18, La partie d’orchestre à cordes est limitée à un simple pizzicato quand le piano peut enfin s’exprimer plus longuement : il déploie des ressources d’amplitude et de poésie que son interlocuteur n’a pas. Le dialogue entre main droite et main gauche est « romantique » et doux : le piano donne à l’orchestre une démonstration d’échange harmonieux entre… soi et soi-même, base indispensable aux autres échanges !
22’59, Ce solo de piano se termine sur une transition que Beethoven affectionne, les trilles. Cette section est très étonnante. La main droite exécute un trille, la gauche esquisse des traits chargés d’étrangeté, dans un mouvement pendulaire.
24’04, Ce plaidoyer du soliste laisse le « méchant » orchestre désarmé. Violons et altos se contentent de tenir un mi prolongé (= une « pédale »). Les cordes graves ne détiennent plus qu’un fragment de leur première idée, débarrassée de toute brusquerie, penaude même, dans son volume sonore très bas.
24’54, Le dernier mot, au piano, s’envole en soupirant.
Rarement une telle dramaturgie aura été atteinte par le simple moyen des notes ; où Beethoven est-il allé chercher ce dialogue entre la rudesse et la douceur, en démontrant la supériorité de cette dernière ?
Isabelle Werck.
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Chronologie de Ludwig van BEETHOVEN (1770-1827)
1770, naissance à Bonn, (né ?) baptisé le 17 décembre
Père ténor à la chorale de la cour de Bonn
1774, 1es leçons de clavier avec le père alcoolique et rude
1778, premier récital à Cologne, à soi-disant « 6 ans »
1779, leçons avec le bon pédagogue Christian-Gottlob Neefe ; publication de sa première œuvre, des variations, en 1782, grâce à Neefe
1784, premier emploi d’organiste à la cour de Bonn
Appui affectueux de la famille noble von Breuning
1787, premier séjour à Vienne (rencontre avec Mozart), mais écourté : mort de sa mère en juillet
1789, début de la Révolution Française
Violoniste à l’Opéra de Bonn pendant quatre saisons, jusqu’en 1792
1792, 2 novembre, second départ pour Vienne, définitif
Etudes un peu mouvementées avec Haydn
Décembre, décès du père ; ses frères Karl et Johann arrivent à Vienne en 1794 et 1795
1795, Premier concert public à Vienne
Grands succès dans la haute société viennoise
Vers 1798, premiers troubles auditifs
1800, le Prince Lichnowsky, son principal protecteur, lui verse une forte pension
Création de la 1e Symphonie
1802, testament de Heiligenstadt : lettre non envoyée à ses frères, où il écrit que sa surdité croissante lui inspire la tentation du suicide
1803, 3e Symphonie, « héroïque »
Début de la féconde 2e période créatrice (jusqu’en 1812, ouvertures, concertos, quatuors 7 à 11, sonates Appassionata ou Waldstein…)
Il s’installe dans une vie de compositeur très régulière : travaille le matin, se balade dans la nature l’après-midi ; déménage souvent.
1806, invasion de Napoléon en Autriche ; rupture de Beethoven avec Lichnowsky
1807-1808, Symphonies 5 et 6 (« Pastorale »)
1809, Vienne bombardée et occupée. 5e Concerto pour piano.
1810, Les Princes Lobkovitz, Kinsky et l’Archiduc Rodolphe s’engagent à lui verser une pension
1812, rencontre Goethe à Teplitz, et le courant ne passe pas très bien
1813-1815, Chute de Napoléon et festivités du Congrès de Vienne. Succès de La Bataille de Vittoria, de la 7e Symphonie et enfin de l’opéra Fidelio.
1815, mort de son frère Karl, Beethoven tuteur de son neveu Karl
1819, sa surdité devient complète. Entame son troisième et dernier style, très moderne (sonate Hammerklavier et 3 dernières, derniers quatuors…)
1824, triomphe de la 9e Symphonie
1826, tentative de suicide de Karl
1827, mort de Beethoven le 26 mars. 10 000 à 30 000 personnes présentes à ses funérailles le 29 ; Franz Schubert tient un des flambeaux.
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